Les intentions générales du RICx

    1. L'intention première du Réseau Intelligence de la Complexité (RIC – MCX-APC) est de contribuer à l’intelligibilité des phénomènes sociétaux et écosystémiques et de s’interroger sur les manifestations de nos conceptions et savoirs en termes de pratiques sociales, de construction de normes, de rapport à l'action et de gouvernance à différentes échelles, y compris celle de l’avenir de l’humanité.

    Notre responsabilité, individuelle et collective, dans la conception des processus d’aujourd’hui qui construisent le monde de demain est une question que nous ne pouvons pas éluder. Les pratiques scientifiques, techniques et plus généralement socio-culturelles interviennent constamment dans les représentations anthropologiques du Monde de la Vie : les sciences en général ne se limitent pas à le représenter en dénommant les choses – « les objets » de recherche –, elles le reconstituent dans une certaine mesure. Il apparait alors important de questionner les catégorisations, les verbalisations, les causes tenues pour évidentes, que l’on utilise pour décrire le cadrage de nos actions. Les bouleversements sociétaux et technologiques des XXe et XXIe siècles, la mise en débats des fondements des sciences de la « Nature » par la relativité et la mécanique quantique, invite à discuter de nos certitudes, des notions et des pratiques les plus usuelles et assurées, à envisager des façons particulières de produire de la connaissance, à s’engager dans des projets de transformation et de développement des acteurs et des pratiques sociales. La remise en cause du prêt à penser et l’effort d’identification - nomination des choses et des actes est un pas sérieux vers la possibilité d’une remise en question des certitudes.

 

    2. Pour ce faire, le Réseau Intelligence de la Complexité incite à une vigilance épistémique et citoyenne quant à la manière avec laquelle la/les sciences s’emparent des grands problèmes de sociétés, cherchent à les rendre intelligibles et créent des connaissances qu’elles proposent comme valides dans le cadre où elles les ont construites. Si le terme « scientifique » est fréquemment avancé par ceux qui veulent donner des bases crédibles aux connaissances, ils expliquent rarement ce qu'ils entendent par « science ». Loin du scientisme « arrogant » et de son inverse consistant à contester la possibilité d’un travail scientifique au nom d’un relativisme absolu, nous proposons explicitement et publiquement dans nos écrits et lors de débats bienveillants, de questionner les options gnoséologiques et épistémologiques fondamentales sur lesquelles les sciences conventionnelles se sont développées. Il s’agit dans un contexte associatif de type « Société Civique de Veille Epistémologique », de travailler – collectivement et individuellement – à situer nos enracinements, nos manières de penser dans les cadres qui les ont historiquement produites, à manifester et discuter les « évidences » que nos vies quotidiennes, toujours sollicitantes, ne nous laissent que peu de temps pour les interroger comme étant un prêt à penser, pré-catégorisé et pré-motionné.

    La connaissance ne pouvant être aveugle à ses conditions de production et d’énonciation, il importe de questionner tout autant les réponses apportées que le questionnement lui-même en se penchant sur ce que l’on mobilise quand on questionne et problématise l’existant : « Que serait un esprit critique incapable d’auto-critique ?». Pour le Réseau Intelligence de la Complexité (RIC – MCX-APC), les questions ontologiques, épistémologiques et pragmatiques soulevées par les théorisations de la complexité et la vision du monde qui l’accompagne sont centrales pour orienter les veilles épistémiques qui éclairent et guident les « Agir et Penser en complexité ».

 

    3. Les lents renouvellements des cadres paradigmatiques dans et par lesquels se forment et se transforment les connaissances humaines laissent perdurer dans nos cultures occidentales, des disjonctions conceptuelles profondes qui sont à la racine de notre manière de penser et d’agir. Par exemple l’affirmation de la séparation entre nature-culture, pratique-théorie, micro-macro, ordre-désordre, … Faire alors appel aux ressources conceptuelles relevant du paradigme de la complexité pour examiner ces questions perçues comme « irréductibles » pousse à discuter ces oppositions simplificatrices et ouvre de nouveaux champs de connaissance et d’action.

La pensée « en complexité » signifie ainsi la manière dont on s’engage dans l’intelligibilité du monde et concerne à la fois i) l’attitude avec laquelle nous abordons des systèmes considérés comme complexes et ii) les référents épistémologiques, c’est-à-dire les processus de pensée et de modélisation que nous utilisons pour comprendre les réalités appréhendées comme complexes. Dans cette suite, le Réseau Intelligence de la Complexité (RIC – MCX-APC) ne propose pas de rejeter en bloc et a priori les hypothèses standards, mais à partir d’un examen de celles-ci de proposer un chemin de réflexion pour enrichir nos cultures épistémologiques afin d’appréhender la complexité des écosystèmes d’action.

Avril 2021