La technologie générale

Note de lecture par LE MOIGNE Jean-Louis

 Il nous a paru légitime d’insérer dans la bibliothèque du Réseau Intelligence de la Complexité la traduction de l’ouvrage d’un professeur de l’université de Göttingen J Beckmann, paru en allemand en 1806 ouvrage  traduit de façon satisfaisante en 2017 sous le titre (‘Projet de Technologie générale’ Les historiens propose de qualifier l’auteur de ce manifeste de « Beckmann 2 » pour souligner le murissement de sa conception de ce concept alors nouveau  puisque le « Beckmann 1 » intitulé ‘Manuel, de Technologie » paru en 1777.. Il fallait assurer la légitimité de la généralisation sous la seule bannière du concept de ‘Technologie Générale’ de tant de techniques spécifiques d’arts, d’écrits, et de métiers formés de main d’homme au fil de l’aventure de l’humanité depuis des millénaires. Ce fut, en reconnaissant dans cette diversité toujours évoluante une caractéristique commune, celle  du PROJET de trans-formation :« Transformer une carrière et une forêt en équilibres magnifiques » ; Ainsi parlait sans doute Eupalinos évoqué par P Valéry s’adressant aux architectes[1]. Transformation par l’identification des Opérations à exercer en Actes, lesquelles s’expriment par des Verbes dénotant les Fonctions à assurer : «Au commencement était l’action » Le célèbre vers du Faust de Goethe parait en 1808. Coïncidence sans doute. Toute Action (ou Fonction) n’est-elle pas  identifiable par un ou plusieurs verbes (et substantif verbal), formés aux fils des usages dans des contextes différents ? C’est par la liste de ces Verbes actifs qu’identifient depuis quelques millénaires artisans et artistes que J Beckmann 2 va pouvoir présenter le Paradigme de la Technologie Générale : celui-ci prendra alors la forme narrative d’une recension associant à ces verbes, ordonnés par types de fonctions, pour chacun d’eux, les  multiples moyens mise en œuvre par tels arts ou métiers pour exercer chacun d’eux. Le même verbe, la même fonction, se retrouvera souvent  dans deux métiers différents. Emergera alors la faisabilité et l’intelligibilité des inter-fonctionnalités concevables (On ne disait pas encore ‘l’intégration’) et l’invention des ‘foncteurs d’interfaces’, des cardans de transmission aux auto-eco-régulateurs. Certes ; tarde encore la re- connaissance de la fonctionnalité et de la poly fonctionnalité des ‘moyens  technologiques’ (ce qu’ils font et peuvent faire) à pénétrer les cultures des praticiens des arts et métiers, des arts et manufactures et des polytechniques ; ne se confinent-elles pas souvent dans la connaissance mimétique et analytique des objets machiniques analysables en ensembles de passives pièces détachés, (‘de quoi sont-ils faits’ au lieu de ‘ce qu’ils font’) ? Pour tirer parti de la résurgence des ressources de l’acte de a connaissance[2] poïétique, et systemique, potentiellement régénératrices que commençait à formaliser le Projet de Technologie  Générale de 1806. la traduction du « Beckmann 2 » symbolise peut être  le murissement de murissement du paradigme épistémologique des sciences technologiques dites encore sciences appliquées  vers le paradigme épistémologique des sciences fondamentales d’ingénierie de conception.


[1] P Valéry Œuvres  T2 de l‘éd Pléiade 1960, -Eupalinos ou l’architecte, p 146

[2]  Entendons ici le ‘Knowing’ plus que le’ Knowledge’