REAPPRENDRE A COOPERER Abécédaire

Note de lecture par ADAM Michel

« Dans un contexte où le travail-emploi est synonyme de mal-être et de désarroi, où les « marchés » et quelques très grandes entreprises sont plus influentes que bien des États, la coopération apparaît comme une voie essentielle pour retrouver les bénéfices d’échanges économiques, sociaux et culturels plus satisfaisants. Et si l’on réapprenait à coopérer ? A travailler ensemble contre la violence, le stress et les effets les plus néfastes de la (dé)structuration sociale, économique et environnementale actuelle… »  Hervé Gouil diplômé d’HEC, ancien directeur de l’Union Régionale des Scop des Pays de Loire, fondateur de la coopérative TEAM ENTREPRENEUR inspirée d’une expérience finlandaise, nous propose un abécédaire savoureux qui multiplie les points de vue sur la coopération. A la fois enthousiaste et lucide, il passe en revue nombre d’auteurs qui ont questionné la coopération comme processus indispensable  dans toute activité économique qui se veut soutenable tout autant que comme forme statutaire d’entreprise aux nombreuses déclinaisons ; soit 12 formes de coopératives à ce jour sans parler des mutuelles et des associations qui s’en réclament à travers leur spécificité propre. D’où l’intérêt de ce travail de quinze ans qui interpelle tous les dirigeants d’entreprise soucieux de durer dans une entreprise vivable et vivante malgré les difficultés de l’époque, qu’ils soient ou non dans une coopérative. Car Hervé Gouil privilégie le processus de la coopération en sa nécessaire modernisation, citant Paul Valéry : « la fidélité aux grandes causes ne consiste pas à faire ce qui a déjà été fait, mais à retrouver l’esprit qui a fait faire ces choses et qui en ferait faire de toutes autres en d’autres temps. » Parmi les 26 entrées proposées, citons entre autres la lecture tonique de Robert Axelrod et sa Théorie du comportement coopératif, qui mériterait d’être plus développée, mais aussi la dialogique majeure individu / collectif abordée sous de multiples angles, psychologique, juridique, philosophique, éthique et qui conditionne tant le projet de coopération. Réjouissons-nous de la forte critique en 5 arguments solides de la formule passe partout de l’économie sociale traditionnelle « remettre l’homme au centre ». Il aurait d’ailleurs pu ajouter un sixième argument grâce à la définition officielle de l’ESS produite par Guy Hascoët et Dominique Voynet dans une circulaire interministérielle de septembre 2000 : « assurer une relation harmonieuse et durable entre les humains et leur environnement » soit coopérer avec et par la Nature, menacée et menaçante à l’époque de l’Anthropocène et du dérèglement climatique. Notons l’apport trop peu connu de Maurice Obadia à travers le concept des deux économies, la matérielle et la relationnelle et leurs combinaisons variées. Ou encore la question du rôle déterminant du féminin dans un nouveau modèle économique et social, mais également la synchronisation des temps individuels repéré comme un des enjeux du futur de la coopération par l’Institute for the Future californien, etc. Un livre à piocher, à lire et relire, à utiliser comme autant de thèmes de dialogue et d’intercompréhension dans nos propres processus de coopération quels que soient  les organisations qui les accueillent et s’en enrichissent... ou les nient. Michel Adam – 27 juillet 2014