Réseau de reliance et reliance de réseaux
« S’en tenir à une posture interdisciplinaire fondée sur une confrontation des points de vue disciplinaires fait l’impasse sur les limites intrinsèques à toute démarche de connaissance. Une approche interdisciplinaire peut être ainsi victime d’une certaine cécité et elle doit pour le moins être consciente de ses limites. La transdisciplinarité, au sens d’une intégration et d’un dépassement des disciplines, est-elle une alternative qui peut être mise en pratique (voire qui doit l’être) ou … »
Bien utile retour à la question oubliée « Qu’est ce que la connaissance ? » Se réduite-elle encore à un empilement de savoirs tenus pour soigneusement disciplinés et dés lors classés durablement par disciplines maitresses et sous disciplines ancillaires ? Réponse désormais inacceptable, certes, mais qu’il ne suffit pas de récuser tant qu’on ne fait pas l’effort collectif de proposer une ou des réponses recevable et argumentées dans une société que nous qualifions volontiers de Société de la Connaissance. Nous disposons certes désormais de solides repères pour raviver ce questionnement à commencer symboliquement par le premier chapitre des ‘Sept Savoirs’ (1999) enraciné dans le riche terreau de ‘La connaissance de la connaissance’ (Le Tome III de La Méthode d’Edgar Morin, 1986). Mais l’addiction aux connaissances fermement disciplinées par les instituions académiques sévit encore souvent et les traitements thérapeutiques adéquats tardent encore à se propager
On est tenté alors de considérer ce dossier - et plus généralement l’orientation générale – de la revue NSS comme une sorte de laboratoire d’expérimentation de prudents traitements thérapeutiques de cette addiction aux normes de validation/légitimation des connaissances formellement disciplinées ou solidement argumentées. C’est ce qui nous incite à attirer l’attention sur ce numéro construit sous l’étendard « Connaître ? Agir ? Interagir ? ». Occasion bienvenue pour actualiser les termes du ‘Grand Débat, 2011 ’ animé par le Réseau sur la question : Que peut être aujourd’hui une formation citoyenne a l’agirópenser en complexité
Parmi les études aisément accessibles de ce numéro 23-2 2015(formé autour d’un dossier « À propos des relations natures/sociétés) : À la recherche des concepts heuristiques sur les relations natures/sociétés par X A de Sartre, B Hubert et F Bousquet -La perception au fondement de la connaissance. Les enseignements d’une ingénierie représentationnelle ternaire par Jean-Pierre.Brechet [at] univ-nantes.fr (Jean-Pierre Bréchet ) et G Gigand

L’équipe d’animation du Réseau Intelligence de la Complexité est heureuse de féliciter sa co fondatrice Marie José AVENIER (‘La Stratégie Chemin Faisant’) qui a reçu cette année le ‘Prix de l’AIM du meilleur article 2015 de la Revue Système Information et Management’, article rédigé avec sa collègue Catherine THOMAS et publié en anglais sous le titre Finding one’s way around various methodological guidelines for doing rigorous case studies: A comparison of four epistemological framework (‘Accès libre pour une durée limitée)
Nous reprenons ici le titre et le texte du résumé en langue française de cet article
Titre : Se frayer un chemin dans la diversité des prescriptions méthodologiques pour construire des études de cas rigoureuses : Repères associés à quatre cadres épistémologiques
Résumé
Les études qualitatives, et plus particulièrement les études de cas, se sont fortement diffusées dans les recherches en systèmes d’information, organisation et management. Cette popularité croissante s’est accompagnée d’une multiplication des formes possibles d’études de cas, entrainant des critiques récurrentes quant à leur rigueur.
Cet article propose des repères heuristiques pour guider la réalisation d’études de cas rigoureuses et leur évaluation en lien avec l’objectif et le cadre épistémologique de la recherche. Il souligne les raisons fondamentales, principalement d’ordre épistémologique, qui expliquent que des repères très différents coexistent dans la littérature au sujet de la conduite d’études de cas rigoureuses À la suite de nombreux auteurs, nous argumentons en faveur de critères d’évaluation contingents, adaptés au cadre épistémologique retenu pour conduire la recherche. Nous complétons leurs travaux de deux manières. Nous considérons deux cadres épistémologiques de plus en plus mobilisés dans les recherches mais encore peu discutés dans ces travaux : le réalisme critique et le constructivisme pragmatique. En outre, nous proposons une mise en perspective des différents critères d’évaluation des recherches qualitatives en lien avec le cadre épistémologique retenu, proposant ainsi un cadre heuristique pour construire de façon critique, informée et raisonnée une étude de cas rigoureuse.

Cet article, de lecture aisée, nous en donnera peut être envie de faire attention à cette question tabou (en parcourant par surcroit les études qui l’entourent)?
Faut-il absolument innover ? : « Poser la question « faut-il innover? » paraît presque incongru voire déplacé. L'innovation s'est insinuée partout comme mot d'ordre et tout le monde s'accorde sur ses vertus capables de produire un «nouveau» mieux que I' ancien. Plutôt qu’un moyen de développement, l'innovation devient un objectif en soi. On oublierait presque de se demander« Pourquoi innover?» puisque l'on cherche à répondre à la question « comment innover? ». Longtemps associé au domaine des techniques, l'innovation dans les procédés et les produits mais aussi dans les modes d'organisation a marqué le développement industriel. Cheval de bataille des politiques publiques sectorielles, territoriales, de recherche et de R&D, l'innovation traverse aujourd'hui tous les secteurs d'activités, du privé au public. Tout comme d'autres domaines d'activité, l'agriculture épouse l'innovation. Pour remporter les appels d'offres du ministère de l'Agriculture, les projets présentés doivent démontrer leur caractère innovant. ..... »

Enfin des chercheurs et des praticiens qui posent la question tabou : « On oublierait presque de se demander« Pourquoi innover?» puisque l'on cherche à répondre à la question « comment innover? » .
« ... L'innovation n'est pas une valeur en soi pour la société et elle doit être regardée à l'aune des processus de développement qu'elle engage. Le développement ne se réduit pas à la capacité à adopter des innovations établies par d'autres ou à une adaptation continue à des événements nouveaux mais correspond à l'augmentation de la capacité des acteurs à définir leur propre visée et à obtenir les moyens de la mettre en œuvre. ... »
Ah, que l’on voudrait que toutes les écoles et facultés s’invitent et nous invitent à méditer cette question si banale. Ne peut-on entendre ‘la notion d'innovation, dans toute sa complexité ? Elle nous invite à penser, dans un environnement stable ou instable, notre rapport au changement et à l'autre, avec qui coopérer »
Ndlr : Nous remercions la Direction de la Revue de sa confraternelle indulgence pour notre emprunt subreptice à l’une des illustrions de ce numéro 65.

EDGAR MORIN : « IL N’Y A PAS DE SOLUTION, MAIS IL Y A UNE VOIE. » mardi 19 mai 2015
Dans un long entretien (huit pages) aisément accessible, publié par Altermonde-sans-frontières du 19 mai 2015 (entretien réalisé le 28 août 2014), Edgar MORIN sous le titre « Il n’y a pas de solution, mais il y a une voie », nous invite à méditer sur l’incroyable aventure humaine de l’hominisation de la Préhistoire ... à nos jours. : Un très bref extrait nous incitera peut-être à sa lecture :
« ...Montaigne a dit : « Je vois en tout homme mon compatriote ». C’est une chose fondamentale qu’il faut maintenir contre vents et marées, surtout à une époque régressive comme la nôtre, où le somnambulisme est de retour. Pour moi, l’humanisme va toutefois au-delà. C’est le sentiment que je fais partie d’une aventure qui est l’aventure humaine. Une aventure incroyable sortie de l’hominisation de la Préhistoire, de la chute des empires… Parvenue jusqu’à nos jours ... nous sommes dans cette aventure inouïe et encore inconnue. Et, dans cette aventure, je crois qu’il faut jouer ce rôle que l’on peut assumer : la solidarité. ... »
Solidarité qui reliera aussi les deux consciences qui émergent aujourd’hui dans l’aventure des sociétés humaines, la conscience civique et la conscience écologique : C’est l’argument qu’a fait valoir Edgar Morin dans son exposé d’ouverture du Colloque « Démocratie participative et modernisation du dialogue environnemental » organisé le 5 mai 2015, par le ministère, de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie (Conseil national de la transition écologique sur la démocratisation du dialogue environnemental). La vidéo de son allocation est accessible ici.

En attendant de voir le fil qui ‘sortira’ en mai 2015 (après sa présentation usuelle en 2014-2015 dans quelques festival), proposons nous tourner les pages du Dossier de présentation (de 28 pages très bien composé et illustré, accessible en ligne), dont on récapitule ici le sommaire : [I] Entretien avec les réalisateurs ; [II] Edgar Morin et le cinéma - Repères biographique] ; [III] Entretien avec Edgar Morin ; [IV] Mathieu Amalric : Double voix (Mathieu Amalric lit, dans un café, les textes fondateurs d’Edgar Morin sur le cinéma) ; [V] Les Réalisateurs & Fiche technique.
NDLR En complément à ce billet rédigé debut avril 2015, uu moment où le film sort en salle, 4 mai 2015, nous nous permettons d’emprunter au journal Le Monde, le texte de la critique de Jacques Mandelbaum publiée dans le numéro du 29 04 15
Sur les pas d'Edgar Morin, de salles obscures en plateaux
Edgar MORIN, CHRONIQUE D’UN REGARD
Il n'est finalement pas mauvais que ce soient des gens concernés, voire passionnés, qui vouent leur énergie et leur temps aux objets d'intérêt public, c'est au moins une garantie qu'ils ne nous feront pas perdre les nôtres. Céline Gailleurd et Olivier Bohler sont de ceux-là, et leurs portraits de cinéastes (Godard, le temps exposé, André S. Labarthe s'expose, du chat au chapeau) s'en ressentent dans le meilleur sens du terme.
Ces deux enseignants en cinéma consacrent aujourd'hui leur talent à resituer l'importance du cinéma dans le parcours intellectuel et sensible du sociologue Edgar Morin. Cette haute figure intellectuelle française, chercheur au CNRS et cofondateur de la revue Arguments, connue pour ses travaux appliqués aux mass media, à la vie sociale et à la défense de ce qu'il a nommé " la pensée complexe ", est une figure chérie des cinéphiles, qui lui doivent moult bonheurs de lecteurs et de spectateurs.
Matière suggestive et vivante Tels seraient exactement l'enjeu et l'ambition de ce film : montrer en quoi la réflexion sur le cinéma, et même l'implication personnelle dans la chose filmée, aura permis à Morin de se constituer, tout à la fois comme homme et comme sociologue. Le film, formellement parlant, fonctionne par strates superposées, entremêlées. Extraits de livres lus par Mathieu Amalric, série d'entretiens en situation avec Edgar Morin lui-même, filmé dans ses lieux privilégiés (rues de Berlin ou de Paris, salles de cinéma, cinémathèques), archives cinématographiques. Cette manière transforme le film en matière suggestive et vivante, dotée à la fois d'une sensibilité à fleur de peau et d'une vraie profondeur historique.
On y lit un parcours politique qui embrasse un siècle duplice, partagé entre l'utopie et l'horreur, où les fantômes de l'écran et ceux de l'Histoire semblent se répondre. On y voit la formation de l'intellectuel, dont la cinéphilie personnelle lui permet de signer des titres majeurs traitant du rapport du spectateur au spectacle cinématographique (Le Cinéma ou l'homme imaginaire,Les Stars). On y revient sur l'explosion du " cinéma vérité " dont il est l'artisan en France, avec Jean Rouch, à travers la réalisation de ce film révolutionnaire pour l'époque qu'est Chronique d'un été (1961). On y découvre des bribes de l'itinéraire intime de ce dandy classieux de 93 piges, avec son feutre taupé et son accent bellevillois, adolescent juif et fils d'immigrés dans le Paris des années 1930, orphelin de mère et trouvant dans les salles obscures le réconfort qui lui permet d'adoucir son absence. Un film captivant et émouvant, à l'image de son personnage.
Jacques Mandelbaum, daté du 29 avril 2015.